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La culture par une nulle
3 octobre 2014

" A l'origine notre père obscur " de Kaoutar Harchi

 

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L'auteur : Née à Strasbourg, spécialisée en socio-anthropologie, Kaoutar Harchi a enseigné à l'université de la Sorbonne-Nouvelle ainsi qu'à l'université de Poitiers. Elle vit aujourdhui à Paris. Elle est l'auteur de deux romans, dont L'Ampleur du saccage, paru chez Actes Sud en 2011.

Quatrième de couverture :

Enfermée depuis son plus jeune âge dans la « maison des femmes », une bâtisse ceinte de hauts murs de pierre où maris, frères et pères mettent à l'isolement épouses, sœurs et filles coupables – ou soupçonnées – d'avoir failli à la loi patriarcale, prise en otage par les mystères qui entourent tant de douleur en un même lieu rassemblée, une enfant a grandi en témoin impuissant de l'inéluctable aliénation de sa mère qu'un infini désespoir n'a cessé d'éloigner d'elle.

Menacée de dévoration par une communauté de souffrance, meurtrie par l'insondable indifférence de sa génitrice, mais toujours aimante, l'abandonnée tente de rejoindre enfin ce « père obscur » dont elle a rêvé en secret sa vie durant. Mais dans la pénombre de la demeure du père, où sévit le clan, la guette un nouveau cauchemar où l'effrayant visage de l'oppression le dispute aux monstrueux délires de la névrose familiale dont il lui faudra s'émanciper pour découvrir le sentiment d'amour.

Extrait :

« Et je parle, je parle, et je lui dis merci de m'avoir préparée, avec dureté, avec distance, avec froideur, à ce qui désormais m'attend. Je lui dis merci de m'avoir habituée au manque, à l'insuffisance, à la rareté, merci, car grâce à elle plus jamais je n'aurai faim, plus jamais je n'aurai soif, plus jamais je ne serai seule. Je lui dis merci pour son amour qui ne m'a jamais comblée, pour sa présence qui ne m'a jamais satisfaite, pour ses baisers qui ne m'ont jamais consolée. Merci de m'avoir appris, en m'aimant si peu, en m'aimant si mal, à devenir ma propre mère, à m'aimer moi-même ».

Mon avis :

Ce roman est une pure merveille de simplicité et de poésie dans l'écriture. Le sujet est plus que le rapport femmes/hommes et la soumission des premières par les derniers. Kaoutar montre que dans cette société patriarcale, les femmes contribuent aussi à ce conditionnement et à l'enfermement d'elles-même. En effet, cette grande maison, où la narratrice est enfermée avec sa mère et d'autres femmes, n'est pas une prison physique : elles sont libres d'en sortir, d'aller en ville ou de s'enfuir finalement. Mais, aucune ne le fait... la prison est psychologique. Meurtries dans leur amour déçu et arraché pour leurs hommes, elles se laissent aliéner et l'idée d'être seules pour affronter l'inconnu les effraie. Elles restent ainsi entre-elles, à pleurer sur leur existence alors qu'une porte de sortie est possible. Seule la narratrice, après la mort de sa mère et la rencontre choc avec son père et son demi-frère, va réussir à franchir cet obstacle et à s'émanciper.

Au-delà de cette histoire, ce roman montre bien à quel point la pression sociale joue un grand rôle dans les rapports humains et empêche souvent de vivre sa vie avec liberté. Il faut ainsi du courage pour être soi-même.

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