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La culture par une nulle
25 août 2013

Deux pays, un Rocher, de multiples possibilités de conflits

Alors que l'article 10 du traité d'Utrecht a fêté ses 300 ans le 13 juillet dernier, Gibraltar enflamme l'Espagne et la Grande-Bretagne cet été. A l'origine de cet embrasement des esprits : les frontières maritimes et le sempiternel débat sur le statut de la presqu'île. Sur cette question, outre les politiques, la presse réagit et prend position.

Depuis  le 24 juillet, Gibraltar, l'Espagne et la Grande-Bretagne sont à nouveau en conflit sur la question des frontières maritimes. Le Rocher a en effet installé un récif artificiel de 70 blocs de béton pour empêcher l'accès aux pêcheurs espagnols. En effet, le gouvernement de Gibraltar déplore depuis plus d'un an l'invasion de leurs eaux riches en fruits de mer par les Espagnols et les Britanniques y voient de "graves incursions". Madrid a aussitôt réagi en mettant en place des contrôles policiers sévères à la frontière, Gibraltar ne faisant pas partie de l'espace Schengen, créant des embouteillages monstres mais aussi en bloquant les accès au port de l'enclave les 18 et 19 août. Ces derniers jours, l'Espagne a également bloquer le passage de camions de pierres destinées à un projet immobilier sur le Rocher et la garde civile espagnole a inspecté les blocs du récif artificiel. Londres a, quant à lui, symboliquement envoyé son navire de guerre HMS Westminster, rappelant pour certains la décision prise par Thatcher pour récupérer les Malouines (même si l'arrivée du navire était prévue de longue date). Ces derniers ont d'ailleurs fait savoir qu'ils soutenaient Gibraltar. Bien évidemment, les deux camps veulent aussi porter leurs différends devant les tribunaux internationaux.

Autodétermination VS intégrité territoriale

Concernant la question maritime, l'Espagne porte en étendard l'article 10 du traité d'Utrecht qui ne mentionne en aucun cas un espace maritime dévolu à Gibraltar. Cet article affirme que l'Espagne cède à la Grande-Bretagne "pour toujours" la propriété de Gibraltar mais "sans aucune juridiction territoriale". Rien sur les eaux. Gibraltar et la Grande-Bretagne, eux, rappellent que Gibraltar, Londres et Madrid ont signé en 1973 et ratifié la Convention des Nations Unis sur le droit de la mer.

Mais, au-delà des différends maritimes, le vrai problème et le maintien des positions dans les deux camps sur le statut de la presqu'île. Pourtant, il y a un peu plus de dix ans, les deux camps avaient tenté de trouver un terrain d'entente, d'autant plus que Gibraltar fait partie de la liste des territoires à décoloniser selon l'ONU. En 2002, un projet visait, par une négociation hispano-britannique, à mettre en place à Gibraltar un condominium, c'est-à-dire l'exercice conjoint des deux pays de la souveraineté sur le Rocher. Ce type de démarche pouvait être vu comme une ébauche de décolonisation. Soumis à un référendum en novembre de la même année, les habitants de l'enclave ont rejeté à 98,97% ce projet (pour une participation de 88%). Gibraltar a souhaité rester britannique.

Il faut souligner que Gibraltar a été historiquement plus longtemps britannique qu'espagnol et la fermeture de la "verja" (grille, nom donné à la frontière) par Franco en 1969, isolant le Rocher du reste de l'Espagne jusqu'en 1982, a contribué à éloigner davantage l'enclave de l'Espagne. Depuis ce référendum-camouflet, la Grande-Bretagne brandit le droit à l'autodétermination des Gibraltariens, qui ont prouvé qu'ils souhaitaient rester britanniques, alors que l'Espagne veut qu'on respecte le principe d'intégrité territoriale.

Une presse qui prend elle aussi position

Les journaux des deux pays prennent bien évidemment leurs positions. A Londres, on critique fortement le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy qu'on accuse d'être à l'origine des conflits et de faire dans le "populisme de la pire espèce" avec son ministre des Affaires Etrangères José Manuel García-Margallo. On accuse aussi l'Europe de ne rien faire pour aider à résoudre les différends. Il est vrai qu'il aura fallu attendre le 19 août pour que la Commission Européenne annonce l'envoi d'une mission d'enquête à Gibraltar. Le quotidien Times rappelle, pour souligner l'inefficacité de l'UE dans ce type de conflits, que Chypre, malgré son adhésion, reste la source de tensions entre la Grèce et la Turquie.

A Madrid, les critiques sont faites vers la Grande-Bretagne et son représentant à Gibraltar, le gouverneur Adrian James Johns mais les critiques les plus virulentes se font envers le chef du gouvernement gibraltarien Fabian Picardo qui campe sur le maintien du récif artificiel. Ce dernier a même fait l'objet d'uneinterview publiée par El País vendredi 24 août, où il affirme que la volonté de l'Espagne d'aller en justice est "une (douce) musique à nos oreilles". Ce dimanche, le même quotidien a ironisé sur les Gibraltariens en évoquant un projet de loi visant à modifier la législation sur la ficalité des entreprises de jeux en ligne bénéficiant actuellement d'avantages. Une taxe de 15% sur les recettes pourrait voir le jour à la place du 1% actuel : "L'ennemi [de Gibraltar] est à Westminster" titre le journaliste, pas en Espagne...

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